1975, l’année des grandes manoeuvres : peu de sorties mémorables pour l’industrie horlogère mais, en arrière plan, des manoeuvres qui permettent aux grands hommes de préparer le rebond post-quartz.
Devine qui vient diner ce soir ? En 1975, la réponse pouvait être : Giscard. Le président en exercice avait alors pour hobby vespéral de venir » dîner chez les français « . A défaut, nul doute qu’il se rendait dans la salle de projection privée de l’Elysée, où l’on passait probablement Peur sur la ville, où Jean-Paul Belmondo cogne sur les méchants à grands coups de Rolex Daytona. Un peu plus près des étoiles, États-Unis et URSS échangeaient leur première poignée de main spatiale : le 15 juillet, les anciens meilleurs ennemis s’arriment l’un à l’autre à bord de Soyouz. Les amabilités cosmiques dureront deux jours. 40 ans plus tard, cette poignée de main historique était célébrée par l’Omega Speedmaster Professional Apollo-Soyuz « 35th Anniversary ». L’exploit, d’une portée technologique sans précédent, était probablement suivi en direct par un jeune homme en pleine création de sa start-up, le 4 avril 1975, une certaine » Microsoft « .
Un autre esprit de génie se rapproche de l’univers horloger, par le biais de son ami Jacques Piguet. Il intègre logiquement Audemars Piguet et y fait ses armes. L’homme apprend vite, très vite. Rapidement, il se sent à l’étroit au sein de la manufacture du Brassus, qu’il quitte pour Omega, avant de reprendre Blancpain. La suite est connue de tous. Son nom: Jean-Claude Biver. Autre génération, autre carrière : c’est également en 1975 qu’Alain-Dominique Perrin prend la tête de Fausse Cartier Montres. Il y restera 23 ans, jusqu’en 1998. Éminence grise de la marque comme du groupe Richemont, ce stratège hors norme a propulsé Cartier là où elle est aujourd’hui : une maison qui représente à elle seule près de 50% des revenus Richemont.
A son échelle, Luigi Macaluso a lui aussi mené une carrière remarquable. En 1975, l’homme est chez Omega, qu’il quitte rapidement pour rejoindre une belle endormie : Girard-Perregaux. L’homme y fait des merveilles et tombe amoureux de la marque…qu’il finira par racheter en 1992 ! En 1975, son premier modèle s’appelle Laureato. Résolument sportive avec sa lunette octogonale et son bracelet intégré, elle rompait avec les codes esthétiques de l’époque. Il est toujours au catalogue.
Mais, au-delà des rachats, il y a les créations. En 1975, Simone Bédat et Raymond Weil décident ainsi de s’associer pour monter une marque éponyme au second. Là encore, le virage économique est bien compris, avec des Fausse Montres suisses, de qualité, mais abordables et produites en volume. Quarante ans plus tard, le modèle économique n’a pas changé. Il est également celui d’une autre marque née en 1975 : Maurice Lacroix. C’est un virage qu’un autre horloger ne décidera pas de prendre : Michel Parmigiani. En 1975, il s’installe dans le village de Fleurier, dont la renaissance horlogère lui doit énormément.
Enfin, toujours en 1975, un jeune horloger installé en Suisse se met à son compte. Anticonformiste farouche, homme au caractère particulièrement bien trempé, cet italien est d’abord soumis au rejet d’une Helvétie passablement raciste, au motif que » les italiens ne savent pas faire de fausse montres « . L’homme prendra sa revanche quelques années plus tard en créant un extraordinaire mouvement baguette, celui qui anime aujourd’hui la T-Bridge de Corum. A plus de 70 ans, Vincent Calabrese est aujourd’hui l’un des vétérans les plus respectés de l’industrie. George Daniels l’était également. En 1975, il mettait au point un type d’échappement révolutionnaire, le Co-Axial. Il équipe aujourd’hui plus de 90%